Le musée
Créé en 1983 dans la perspective du bicentenaire de 1989, par le Département de l’Isère, le Musée de la Révolution française offre un nouveau regard porté sur une période charnière de l’Histoire de France à partir de la production artistique qu’elle a suscité à l’époque et depuis.
Installé dans un site où la Révolution française est célébrée depuis deux siècles, le musée propose un éveil critique du regard et une vision en perspective des arts et de l'histoire. En reliant les événements à leur contexte et à leurs représentations, il invite ses visiteurs à lever le voile des apparences et à dépasser les fausses évidences véhiculées par les idées préconçues, les mythes et les propagandes.
L’originalité de ce musée est de rendre compte de l’histoire à travers des œuvres d’art. Ces dernières ne sont pas de simples illustrations des événements et des grands acteurs de la Révolution. Grâce à leur puissance évocatrice, à leur contenu et au contexte de leur création, elles nous permettent de mieux pénétrer l’esprit de cette époque.
Les collections témoignent de l'état d'esprit des femmes et des hommes contemporains de la Révolution française et des régimes politiques suivants, en tenant compte de la complexité sociale du temps. Le musée présente des œuvres d'art et des objets d'histoire de l'époque révolutionnaire et s'intéresse à tout ce qui s'y réfère ou s'en inspire depuis deux siècles. Tout en évoquant les événements majeurs dont Paris fut le théâtre, la collection s'ouvre sur l'art et l'histoire dans les régions françaises et dans les pays européens limitrophes.
Les peintures et les sculptures révolutionnaires forment un ensemble exceptionnel d'une grande diversité de styles et de genres. Plusieurs bustes offrent les traits fidèles de personnages célèbres, tels Barnave, Bailly, Mirabeau, et Robespierre.
Parmi les objets les plus singuliers, figurent des pierres de la Bastille et les sabres de la garde nationale. Quant aux œuvres du XIXe siècle, elles attestent de la vitalité de la référence à 1789 dans le mouvement qui a conduit à l'établissement de la République française. Expression de leur temps, elles rappellent que l'actualité politique et la recherche historique ont fait évoluer l'approche et l'interprétation de la Révolution.
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Quelques salles du musée
Salle des faïences
La première salle du musée située au rez-de-chaussée est consacrée aux faïences patriotiques.
Elles connurent un grand succès pendant la Révolution, d’autant que la faïence, de moins en moins chère au cours du 18e siècle, était devenue plus populaire. Les décors des faïences patriotiques diffusent les idées et les aspirations de la Révolution grâce à un langage imagé et symbolique simple.
Contrairement aux gravures et aux pamphlets dont le discours est souvent violent, les faïences restent des objets décoratifs : les sujets peints sur l’émail mettent l’accent sur l’union nationale, la paix, le bonheur, même si l’humour et l’impertinence ne manquent pas.
Les assiettes ne furent pas les seuls supports de messages politiques. De nombreuses pièces de forme dont les exemples sont nombreux dans cette salle - fontaine, pichet, plat à barbe, jattes, tonnelet, bouquetière, montrent le savoir-faire des faïenciers de l’époque révolutionnaire.
La plupart des faïences de la collection du musée ont été créées dans les principaux lieux de production, en Angleterre, en Hollande et en France : Lorraine (Niderviller, Luneville, Islette), Nevers, Roanne, Nord de la France.
Salle de l’été 1789
La salle de l’été 1789 du musée située au rez-de-chaussée est consacrée notamment à la Bastille, à la garde nationale et aux armes.
La prise de la Bastille, forteresse parisienne servant de prison d’État, eut lieu le 14 juillet 1789. Elle ne fut pas réellement décisive et il ne restait que peu de prisonniers « embastillés » par lettres de cachet du roi. L’événement symbolisa pourtant très vite la libération de Paris, la destruction du pouvoir arbitraire du roi et, par-là, la chute de l’Ancien-Régime. En témoignent les objets commémoratifs exposés dans cette salle.
La maquette de la Bastille a été réalisée avec les débris de la forteresse démolie dès le 16 juillet. Elle est munie de poignées pour être transportée dans les processions patriotiques comme des reliques de saints. Sur une initiative de Palloy, entrepreneur chargé de la démolition de la forteresse, des maquettes similaires furent envoyées dans chacun des départements nouvellement créés par le décret du 26 février 1790.
En 1880, le 14 juillet deviendra le jour de la fête nationale (française).
Salle de la République
La salle de la République a été creusée en 1992 dans le rocher sur lequel repose le château.
Les colonnes sont inspirées du dessin d’un projet d’époque révolutionnaire.
Des peintures de grand format mises en dépôt par d’importants musées français sont exposées. Elles donnent une idée de l’immense résonance de l’événement révolutionnaire dans l’histoire et les arts, de la fin du XVIIIe siècle à la Troisième République.
Salle des arts
Dans l’ancienne cuisine du château, la salle des arts regroupe tableaux, sculptures et arts décoratifs qui témoignent de la vitalité de la production artistique pendant la période révolutionnaire.
Sous l’Ancien Régime, l’Académie, véritable émanation du pouvoir, contrôlait les arts. Elle distribuait les commandes, autorisait l’accès aux Salons et garantissait la hiérarchie des genres : la peinture d’histoire dominait, encore renforcée, depuis les années 1775, par le goût néo-classique préconisant le retour à des formes tirées de l’Antiquité classique.
La Révolution introduit la liberté d’exposer, entraînant une production pléthorique malgré le manque de moyens et l’instabilité politique. Le pouvoir cherche à soutenir matériellement les artistes, abandonnés par les mécènes traditionnels. Les révolutionnaires sont en effet conscients du rôle pédagogique des arts et ont besoin des artistes pour élaborer les symboles et les monuments de la République. Le principe des concours anonymes et démocratiques est instauré, proposant des thèmes tirés de l’actualité, bien que les sujets antiques, héritage de l’esthétique dominante, restent très prisés.
La visite de cette salle et des différentes œuvres exposées permet d’entrer un peu plus dans l’esprit de cette décennie riche et troublée.
Salle du XIXe siècle
Les œuvres exposées dans la salle du XIXe siècle montrent combien la référence à la Révolution française a été essentielle pour ce siècle, quitte à être interprétée et mise au service d’une cause ou d’une autre.
Elles soulignent également le goût du XIXe siècle pour la représentation et la célébration des « hommes illustres » censés devenir des modèles civiques et les mythes fondateurs de la République : des monuments publics sont élevés et de nombreux amateurs se disputent les portraits en médaillon comme ceux qui sont présentés dans les vitrines situées au centre de la salle.
Bibliothèque Perier
La bibliothèque située au troisième niveau du musée, est l’une des pièces où subsiste un décor rappelant les anciens occupants du château. Les boiseries ont été aménagées vers 1880 par Camille Fontenillat, mère de Jean Casimir-Perier, qui se dessaisira en 1895 du château, dans la famille depuis plus d’un siècle.
Le fonds de la bibliothèque provient principalement des acquisitions faites par la famille Perier, puis par Casimir Perier, propriétaire du domaine de 1780 à 1895. Parmi les 4000 ouvrages conservés, la partie consacrée à la littérature du XVIIIe siècle offre un intérêt particulier.
Salle de Psyché
La salle dite de Psyché a été décorée lorsque le château fut acheté par l’État en 1924 à l’occasion de l’installation des présidents de la République.
Le nom de la pièce vient du sujet du papier peint panoramique qui orne ses murs : Les Amours de Psyché et de Cupidon. L’histoire, ici racontée en 12 panneaux traités en camaïeu de gris, se réfère au roman de Jean de La Fontaine tiré de L’Âne d’or, célèbre conte d’Apulée. Elle raconte comment Psyché, personnification de l’âme, fut aimée par le dieu Amour malgré l’opposition d’Aphrodite qui était jalouse de sa beauté.
Les prototypes de ce décor, qui a connu un grand succès et fut plusieurs fois réédité, ont été créés par la manufacture Dufour et Leroy en 1816. Les dessinateurs Lafitte et Blondel s’inspirèrent, pour quelques-unes des scènes, d’estampes de François Gérard datant de 1797 et d’une œuvre peinte par Prud’hon autour de 1808 : Psyché enlevée par les Zéphirs.
Salle du centenaire
La salle du centenaire de 1789 illustre comment dans les années précédant le centenaire de la Révolution française, les républicains, c’est-à-dire ceux qui se réclamaient le plus explicitement de l’héritage de la Révolution française, remportèrent des victoires décisives sur leurs adversaires monarchistes et conservateurs. La République, ébranlée par la vague anti-parlementaire du boulangisme, demeurait néanmoins fragile.
Dans ce contexte, la commémoration de 1789 donnait à la République de Sadi Carnot l’occasion d’affirmer son unité à l’intérieur et son rayonnement international face aux monarchies européennes. Une exposition universelle fut ainsi organisée. La dimension commémorative était présente à côté de la perspective moderniste dont la tour Eiffel témoigne toujours. Parallèlement, l’approche du centenaire avait relancé les recherches historiques, donnant lieu à de nombreuses publications. Dans le même temps, la France se couvrait de statues et monuments en hommage aux grands hommes et aux valeurs de la Révolution française.
Salle Gaston Doumergue
La salle Gaston Doumergue (1863-1937) est située dans la grosse tour ronde du XIVe siècle, partie la plus ancienne du château. Cette pièce a été utilisée comme chambre à coucher par les Présidents de la République. Elle est consacrée à Gaston Doumergue qui en 1924 prit possession du château de Vizille, dont l’acquisition avait été décidée sous son prédécesseur Alexandre Millerand.
En effet, ce site prestigieux, lieu de mémoire révolutionnaire et de tradition républicaine depuis la célèbre Assemblée de Vizille de 1788, se trouvait par sa mise en vente, menacé de perdre son intégrité foncière, et surtout de se dégrader rapidement. Ce sauvetage de Vizille, au plus haut niveau de l'État, peut aussi correspondre à une première tentative de restauration de l'image de la Révolution française après les terribles années de guerre que venait de connaître la France.
Les parois sont décorées avec un tissu en satin, coton et fibranne intitulé Jets d'eau édité en 1925 par la maison Brunet-Meunié d'après un dessin d'Édouard Bénédictus (1878-1930). Le modèle avait été conçu pour le grand salon de réception d'une ambassade française. Il agrémentait à l'origine le cabinet du secrétaire général de la présidence (actuelle salle du XIXe siècle), avec un mobilier, aujourd’hui conservé au Mobilier national, réalisé d’après les dessins de Jacques-Emile Ruhlmann (1879-1933). Les appliques, les lampadaires, le tapis et le salon proviennent de l'ancien billard installé en 1927. Les décors de l'ancien cabinet du secrétaire général de la présidence et de l'ancien billard furent les seuls apports artistiques notables de toute la période présidentielle du château (1924-1972).
Sur la cheminée, buste en bronze de Gaston Doumergue par Henri Calvet (1877-1948) exécuté en 1930 (dépôt du Musée des Beaux-Arts de Nîmes).