L'ardoise du maréchal
Marquer les esprits des valeurs pétainistes dès l’enfance.
L’objet présenté ici illustre bien dans quelle atmosphère vivaient les Français sous l’Etat Français, et ce dès le plus jeune âge.
Instauré en juillet 1940, le régime de Vichy met rapidement en place comme dans tout régime autoritaire un culte du chef au bénéfice du maréchal Pétain. Ses yeux bleus observent constamment les français d’un air paternaliste, que ce soit sur des affiches placardées dans la rue ou dans les pages des magazines. Les enfants ne sont pas oubliés puisque son portrait trône dans toutes les salles de classe au-dessus du tableau noir, qu’on incite à lui écrire et qu’on leur apprend des chansons à sa gloire. De plus, Pétain ayant attribué la responsabilité de la défaite de 1940 à l’esprit de jouissance qui avait envahi la société et notamment la jeunesse, cible principalement la cellule familiale dès l’enfance pour redresser la France en lui inculquant les valeurs traditionnelles prônées par la Révolution nationale.
Cette ardoise en plastique, rare pour l’époque, a été offerte à une petite grenobloise de 8 ans scolarisée à l’Institution Bois-Rolland situé rue Joseph Fourier, lors de la visite officielle du maréchal Pétain dans la capitale des Alpes le 19 mars 1941. Elle arbore la devise du régime, « Travail Famille Patrie », le nom du chef de l’État Français, et ses sept étoiles de maréchal. L’ardoise adresse également des messages de propagande aux enfants, tels que « Suivez-moi. Gardez votre confiance en la France éternelle ».
Comme lors de chaque voyage en province de Pétain qui ne sont pas sans rappeler les anciens voyages royaux de l’Ancien régime, les rues de Grenoble sont décorées et les écoliers et employés sont « invités » à venir acclamer le vainqueur de Verdun sur son passage. Le long convoi de 22 voitures et 4 bus emprunte d’ailleurs l’ancien boulevard Gambetta, renommé Maréchal Pétain en son honneur.
Cependant, malgré la ferveur et l’enthousiasme qui semblent envahir la ville de manière unanime, les nombreux contrôles de police qui accompagnent cette journée rappellent que des voix dissidentes commencent déjà à se faire entendre en cette année 1941.