Domaine de Vizille - Musée de la Révolution française
En France, comme en Europe, à partir des années 1750-1760, en réaction aux formes rocailles ou rococo, le style contemporain s’inspire d’une manière de plus en plus appuyée des objets, décors et architectures de l’Antiquité grecque et romaine découverts en Italie. Qualifiés de style Louis XVI ou de style Directoire, les arts décoratifs de la dernière décennie du XVIIIe siècle ont été dépouillés de leur spécificité historique par rejet de la Révolution française, au profit de la fin du dernier règne de l’Ancien Régime et de la période post-thermidorienne, après 1794. Tout découpage de ce genre étant arbitraire, pourquoi ne pas mettre en avant un « style Révolution française » qui couvrirait les années de Liberté faisant suite à la prise de la Bastille de 1789 à 1792 et celles des débuts de la République française de 1792 à 1799, jusqu’au Consulat ?
Il se dégage en effet des meubles, objets d’art et papiers peints de cette époque, qui déclinent les décors et les motifs de l’Antiquité, une sobriété et une élégance mesurée absentes des créations de la monarchie ou de la période napoléonienne (Consulat et Empire) dont les références sont pourtant les mêmes. Cela vient en partie du profond renouvèlement des élites et des tensions qui traversent la société française. L’irrésistible mouvement initié par les Lumières, mélange de rationalisation et d’émancipation qui dynamise la fin du XVIIIe siècle et en même temps la bouleverse, infléchit les goûts tout en s’appuyant sur un savoir-faire des maîtres et ouvriers du meuble ou des objets d’art, qui ne faiblissent pas pendant cette décennie. Au contraire, malgré les contraintes et la dérèglementation, les ateliers trouvent d’autres clientèles, modifient leur approvisionnement en matières premières, inventent, tout en conservant l’excellence de leurs métiers que toute l’Europe leur envie. Les arts décoratifs de la période révolutionnaire, comme les arts en général sont aussi magnifiques que ceux des époques précédentes et suivantes, avec une inflexion et un esprit différent, bref un art parfois engagé mais surtout réfléchi et mesuré.
La présentation de mobiliers de Pierre Achard, Georges Jacob, Jean-Baptiste Sené et Adam Weisweiler, d’objets d’art de Louis- Simon Boizot et Joseph Chinard, et de la Manufacture Réveillon, en sont ici la preuve éclatante.